“Débats éthiques, sagesse biblique” d’Anne-Marie Pelletier, Salvator 2018

Débats éthiques, Sagesse biblique

Révision des lois de bioéthique, phénomène migratoire de masse, crise écologique planétaire… Sur ces sujets d’actualité brûlante, la Bible offre-t-elle un réservoir de sens ? Peut-elle aussi inspirer un style d’action aux chrétiens impliqués dans les débats en cours ? À quelles conditions leur engagement peut-il être crédible et efficient ? À ces questions, l’auteur répond sans détour en s’appuyant sur sa profonde connaissance biblique et sa conviction que les Écritures peuvent éclairer puissamment la « crise de l’homme » que traverse notre civilisation. Ce faisant, et parce que la sagesse biblique se veut en lien avec l’universel, Anne-Marie Pelletier montre que la défense de la vie et de l’humanité est un combat où la voix des chrétiens peut rejoindre nos contemporains.

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Anne-Marie Pelletier, née en 1946, est agrégée de lettres modernes et docteur en sciences des religions. Spécialiste d’herméneutique biblique, elle enseigne à la Faculté Notre-Dame (Paris). Elle est l’auteur d’ouvrages de référence comme D’âge en âge, les Écritures (Cerf/Lessius, 2004), Le signe de la femme (Cerf, 2006), Le livre d’Isaïe ou l’histoire au prisme de la prophétie (Cerf/Médiaspaul, 2008). Lauréate du Prix Ratzinger en 2014, elle a publié chez Salvator, en 2018, La mesure de l’amour : chemin de croix.

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Extrait de la recension de Françoise Mies[1] :

Le lecteur ne trouvera dans ce livre ni une analyse de textes bibliques dont seraient déduites des applications éthiques, ni une analyse de débats éthiques qui seraient éclairés par la Bible. L’A. dégage plutôt deux données structurantes de l’anthropologie biblique : la place matricielle de la relation, impliquant le respect de la différence et l’expérience de la limite ; la préférence divine pour les moyens faibles et la vulnérabilité plutôt que la puissance pour faire avancer l’histoire sainte. Or, le mal qui ronge notre société est de vouloir se prémunir de l’exposition à l’autre (autrui, événement, chair ou Dieu), alors que c’est le chemin de vie proposé par la sagesse biblique. L’A. invite le chrétien à prendre la position du témoin, témoin de la sagesse biblique et ainsi d’une humanité en proie aux mêmes démons que les nôtres mais qui apprend à discerner le chemin de vie par la relation. Reconnaissant en lui-même et dans la Bible les âpretés de cet apprentissage, que le chrétien témoigne aussi de la miséricorde et de la confiance que, malgré tout, Dieu mène le monde à son salut. À la lumière de cette sagesse, l’A. évoque les débats autour du genre, de la différenciation sexuelle, des identités fluides et du mariage, de la grossesse et des mères porteuses, de l’avortement et de l’euthanasie, des replis identitaires, de l’homme augmenté et du transhumanisme.

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Extrait de la présentation de la Sagesse biblique dans l’ouverture du livre :

Sagesse, en contexte biblique, est beaucoup plus qu’une forme de bon sens pratique, même si elle ne dédaigne pas ce registre. Elle est révélée comme réalité divine, « issu de la bouche du très haut » (Siracide 24,3), présente à l’humanité dès sa création et qui l’accompagne, dans un mystérieux compagnonnage, en pédagogue fidèle, avisé, rempli de sollicitude pour guider les hommes sur les chemins qui assurent vie et bonheur. Elle est ce bien infiniment précieux que Salomon sait préférer à tout, en la mettant au cœur de sa prière et de sa demande quand il devient roi. Toute une série de livres de la Bible sont occupés par elle et explorent, sous son inspiration, les grandes questions de l’humanité, le mystère du temps qui va vers la mort (Qohéleth), celui de la souffrance qui ébranle le juste (Job), mais aussi l’énigme de l’homme et de la femme, l’expérience du désir, les aléas et les bonheurs de la rencontre de l’autre (Cantique des cantiques), toute la vie en somme, telle qu’elle se vit avant même de se penser. […]

Cette même Sagesse qui promet : « Qui me trouve a trouvé la vie » (Proverbes 8, 35), est aussi celle qui élargit, pour qui la fréquente, le cercle de ses proches, en récusant les frontières des communautarismes : personnifiée dans le livre des Proverbes, elle est montrée postée aux portes de la cité, aux lieux de plus grand passage, où elle hèle généreusement tous les enfants des hommes (Pr 8, 4). […]

On ajoutera enfin que cette Sagesse biblique a certainement à voir avec ce qu’enseigne Jésus dans la parabole du bon grain et de l’ivraie (Matthieu 13, 24-30) car, en enseignant le discernement, elle est aussi maîtresse de patience. Aux affolements qui nous feraient anticiper le jugement final, elle oppose ainsi la confiance de qui s’en remet à l’heure que Dieu seul connaît et qui seule manifestera la vérité.

Dans l’immédiat, gageons que la première nécessité qui s’impose aux chrétiens est de reconnaître les voies de la Sagesse, de la prendre pour guide et conseillère, sachant que l’alternative est le service de celle que les mêmes textes appellent Dame Folie (Pr 9, 13-18). Contrefaisant les gestes et les paroles de la Sagesse, prévient encore le livre des Proverbes, celle-ci fourvoie ceux qu’elle séduit, les entraînant vers les enfers, ce territoire sous la juridiction de la mort. Que la folie ne manque pas de disciples zélés aujourd’hui, nous ne le savons que trop. […] Les pages que l’on va lire ont pour seule ambition de laisser les Écritures bibliques stimuler notre souci et notre estime de la Sagesse telle qu’elles enseignent à la connaître. Faisant dire à Salomon : « Tout l’or, au regard d’elle, mais qu’un peu de sable ; à côté d’elle, l’argent compte pour de la boue », et osant même ajouter ce comble pour notre temps obsédé de thérapie et d’esthétique retouchée : « Plus que santé et beauté je l’ai aimée » (Sagesse 7,9) !


[1] NRT 141-1 (2019), en ligne sur https://www.nrt.be/fr/recensions/debats-ethiques-sagesse-biblique-13263.

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